Hydrobie des antipodes
Ce petit escargot non commercialisé s'invite parfois dans nos aquariums. Discret, il est facile à maintenir et à élever car les souches européenne sont parthénogénétiques. C'est un brouteur d'algues intéressant, mais il a le défaut d'être considéré comme invasif en Europe. On veillera donc à éviter sa dispersion.

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Taxinomie
Descripteur : Gray, 1843
Classe: Gastropoda
Ordre: Neotaenioglossa
Famille:  Hydrobiidae
Genre:  Potamopyrgus
Synonymes
Amnicola antipodanum (Gray, 1843)
Bythinella exigua (Tenison-Woods, 1879)
Bythinella pattisoni (Cotton, 1942)
Bythinia legrandi (Tenison-Woods, 1876)
Bythinia tasmanica (Tenison-Woods, 1876)
Bythinia unicarinata (Tenison-Woods, 1876)
Hydrobia antipodum (Martens, 1873)
Hydrobia fischeri (Dunker, 1862)
Hydrobia jenkinsi (Smith, 1889)
Hydrobia reevei (Fraunenfeld, 1865)
Hydrobia spelaea (Fraunenfeld, 1865)
Hydrobia ventrosa (carinata Marshall, 1889)
Paludestrina cumingiana (Fischer, 1860)
Paludestrina jenkinsi (Smith, 1889)
Paludestrina legrandiana (Brazier, 1872)
Paludestrina salleana (Fischer, 1860)
Paludestrina wisemaniana (Brazier, 1872)
Potamopyrgus antipodarum (Gray, 1843)
Potamopyrgus jenkinsi (Smith, 1889)
Potamopyrgus niger (Quoy & Gaimard, 1835)
Pseudamnicola lanceolata (Cherbonnier, 1952)
Noms Communs
Hydrobie des antipodes
Hydrobie de Jenkins
Nasse de Nouvelle Zélande (Canada)
New-Zealand jenkins spire
New Zealand spire snail
New Zealand mud snail
Jenkins's spire snail
Membres du genre Potamopyrgus
Origine géographique
Aire d'origine : Océanie
Nouvelle-Zélande
Aire actuelle
Cosmopolite
Potamopyrgus antipodarum est natif de Nouvelle-Zélande et des îles avoisinantes. Il a été introduit en Australie, en Tasmanie et en Europe au cours des 19e et 20e siècles. Aux États-Unis, il est enregistré pour la première fois en 1987, dans les eaux du Snake, une rivière qui traverse l'État de l'Idaho. Il a été introduit avec des poissons d'élevage au Japon en 1990 et dans les eaux canadiennes des Grands Lacs en 1991.

Cet escargot est enregistré comme envahissant en Europe, notamment en Belgique, en France et en Suisse.

En France, elle est présente dans tous les bassins hydrographiques (Onema Nord-Est, 2015). Sa grande plasticité écologique, son taux de reproduction et ses capacités de dispersion élevés lui permettent d’établir des populations abondantes avec des effets significatifs sur les écosystèmes (Alonso & Castro-Diaz, 2008 in GISD 2016).
L'espèce est cependant non réglementée.
Environnement
Paramètres
Milieu
Douce, Saumâtre
Dans son aire de répartition naturelle, cette espèce est présente dans les cours d’eau et les lacs d’eau douce et saumâtre. En dehors de son aire de répartition d'origine, cette espèce a colonisé dans une grande variété d'habitats, notamment des réservoirs, des étangs post-industriels, des cours d'eau géothermiques, des marais de polders, des lacs côtiers, des estuaires et la mer. Cette espèce prospère dans les habitats perturbés, tolérant des niveaux élevés de nutriments et l'envasement. On la trouve sur une variété de substrats, y compris les macrophytes aquatiques, l'argile, le sable fin et la boue, et semble tolérer aussi bien les environnements à écoulement rapide que lent. On ne le trouve que dans des eaux peu profondes, de moins de 50 m de profondeur et à 650 m d’altitude en Suisse.

L’hydrobie des antipodes est une espèce d’eau douce euryhaline car elle est capable de survivre dans des salinités très variables. La salinité optimale est probablement inférieure ou égale à 5 ‰, mais P. antipodarum est capable de se nourrir, de grandir et de se reproduire à une salinité de 0-15 ‰ et peut tolérer de 30 à 35 ‰ .
Potamopyrgus antipodarum est aussi eurytherme et supporte des températures de 2°C à 34°C, mais ne supporte cependant pas le gel.
Elle n’est pas amphibie mais peut survivre jusqu’à dix jours sur une surface humide et une trentaine d’heure dans un air sec. Cette espèce peut s'enfouir pendant les périodes sèches ou froides.
Cet escargot tolère l'envasement et prospère dans les bassins versants perturbés où les éléments nutritifs favorisent la croissance des algues vertes filamenteuses. Il s'installe parmi les plantes et préfère les zones littorales dans les lacs ou les cours d'eau lents avec des substrats de limon et de matières organiques.
Il tolère aussi les environnements à débit élevé où il peut creuser dans les sédiments.

Attention ! : Cette espèce, dans les milieux favorables, peut être présente en très grand nombre : 5 000 à 20 000 individus par mètre carré (voire plus de 300 000 ou même 500 000 par mètre carré aux États-Unis d'Amérique) au point de recouvrir complètement les algues et la vase sur laquelle elle rampe.
Potamopyrgus antipodarum a été évalué comme "Préoccupation mineure". Cette espèce est abondante et connue pour se produire à des densités de population élevées dans ses aires de répartition indigènes et dispersées.
Bien que les menaces qui pèsent sur cette espèce ne soient pas connues, il est actuellement peu probable qu'elle soit affectée par des processus de menace majeures.
Description
Taille
: 0,3 à 1,3 cm SL
Respiration
Pulmonaire
Longévité
1 à 2 ans
Régime
Omnivore
Potamopyrgus antipodarum a une petite coquille dextre, présentant cinq à huit spires de forme ovée, allongée de trois à six millimètres de long, parfois avec une carène et parfois avec des épines sur cette carène. Dans sa région d'origine elle peut atteindre treize millimètres avec sept à huit tours de spire.

La forme de la coquille est très variable, la surface peut être lisse ou avec une carène (présence d'une ligne fine ou d'une arête avec de petites épines formées par le périostracum) Le périostracum est la fine enveloppe qui constitue la partie la plus externe de la coquille des mollusques et des brachiopodes, entre autres. On le trouve aussi bien chez des espèces terrestres, marines ou dulçaquicoles. Le périostracum fait partie intégrante de la coquille. Il se forme en même temps que les autres couches de la coquille.. La spire est gonflée et la suture profonde. La coquille de certains individus porte souvent des dépôts noirs qui ne permettent pas de voir la forme de la spire, alors que d’autres ont une coquille propre, jaunâtre allant du brun clair au brun foncé.
L’ouverture est ovale, avec un péristome épaissi chez les individus adultes. L’ombilic est fermé par la lèvre interne de l’ouverture. L’opercule solide est ovale, fin et corné (la plupart des escargots d’eau douce n’ont pas d’opercule).
Cet escargot a un mufle long, étroit se terminant en deux lobes, plus ou moins uniformément pigmenté de sombre, avec parfois une bande transversale pâle antérieure. Les tentacules céphaliques sont longs et ciliés, pâles avec une base plus sombre ; il y a une zone foncée derrière chaque œil à la base de chaque tentacule. Le bord du manteau ne porte pas de tentacule palléal.

En Europe, malgré de nombreuses variations individuelles au sein de ces espèces, la pigmentation des tentacules semble être un caractère utilisable pour séparer les différentes espèces d'hydrobies.
Toutes les populations introduites sont donc des clones et se reproduisent par parthénogenèse. Les individus peuvent varier considérablement en forme, taille, couleur et ornementation de la coquille, même au sein d'une population, ainsi que parmi les clones. Certains individus et certains clones par exemple présentent une forte carène hérissée de soies.

Espèces ayant des marques sombres sur les tentacules :
- Peringia ulvae ou hydrobie saumâtre : sous l'extrémité de chaque tentacule on peut observer un petit anneau sombre (irrégulier à gauche, régulier à droite). Le tentacule gauche est un peu plus épais que le droit.
- Hydrobia acuta neglecta Muus 1963 ou hydrobie du Danemark : sur chaque tentacule on observe une zone sombre en forme de V inversé, longue sur le tentacule droit et courte sur le tentacule gauche. Cette sous-espèce, discrète, vit dans des lagunes peu profondes d'eau salée (10 à 35 ‰). Elle fait partie d'un ensemble d'espèces divisé en deux zones géographiques : Hydrobia acuta acuta (Draparnaud, 1805) ou hydrobie méridionale, en Méditerranée et en mer Noire et Hydrobia acuta neglecta sur la côte ouest de la Manche, la mer du Nord et la mer Baltique. Entre ces deux zones, du sud de la Bretagne aux côtes de l'Afrique de l'Ouest, une autre espèce très proche est présente : Hydrobia glyca Servain, 1880 ou hydrobie de Cadix.
Espèces sans marques sur les tentacules :
- Ecrobia ventrosa (Montagu, 1803) ou hydrobie atlantique : elle vit dans des lagunes d'eau salée (1 à 36 ‰) peu profondes. Les tours de la coquille sont plus dilatés. On observe, en arrière de l'œil, une zone claire.
- Heleobia stagnorum (Gmelin, 1791) ou hydobie obèse est souvent confondue avec l'hydrobie atlantique. Du fait de la confusion avec Ecrobia ventrosa, la répartition de l'hydrobie obèse est mal connue. Vraisemblablement toutes les signalisations continentales concerneraient H. stagnorum. (DORIS)

Potamopyrgus antipodarum peut aussi réagir à certains stimuli chimiques présents dans l’eau (comme l’odeur de poissons prédateurs) et ainsi se cacher sous des pierres pour éviter la prédation.

Ce mollusque est extrêmement actif et peut se déplacer aussi bien de jour que de nuit à près de trois centimètres par minute.

Attention ! : Potamopyrgus antipodarum est également connu sous le nom de P. jenkinsi (Smith 1889) en Europe. Les populations australiennes étaient connues sous le nom de P. niger (Quoy et Gaimard 1835) en raison de l'interprétation erronée de Paludina nigra (Ponder 1988).
 
Régime Alimentaire
Potamopyrgus antipodarum est un brouteur essentiellement nocturne, se nourrissant de détritus végétaux et animaux.
ll se nourrit principalement d’algues vertes filamenteuses et d’autres algues, d'algues microscopiques épiphytes, de diatomées benthiques ainsi que de bactéries.
Dimorphisme
Il n'y a pas de différence visible entre les sexes.
Les individus présents en Europe sont des femelles.
Dangerosité
 
 
 Faible
Cet escargot peut être l'hôte de trématodes parasites du genre Microphallus dont les larves se développant au sein de ses gonades, entraînent son incapacié sexuelle. Ainsi, l'infection parasitaire d'une population d'hydrobies des antipodes induit une sélection des femelles asexuées.

Note : L'hydrobie des antipodes est le premier hôte intermédiaire d'une quinzaine d’espèces de vers trématodes digénétiques parasites (deux hôtes successifs). Le second hôte est un oiseau. Ces vers trématodes infectent les escargots en tant que larves qui se développent dans les gonades et stérilisent les individus infectés. Mais il semble que lorsque les trois espèces Peringia ulvae, Ecrobia ventrosa et Potamopyrgus antipodarum sont présentes au même endroit, cette dernière n’est pas infestée. (DORIS)
Maintenance
Population
1 minimum
Zone
Inférieure, Centrale, Supérieure
Paramètres
Température
        1      15              25      30
pH
         6      7            7,5      9
GH
         2       10              20       30
Brassage
Aquarium
Volume
2 l minimum (10 l recommandé)
On ne cherche généralement pas à élever cette espèce d'escargot, mais sa maintenance très aisée ne pose aucun problème quel que soit les paramètres de l'eau et la configuration du bac.

Disponibilité commerciale : Non disponible

Bien que non disponible commercialement, cet escargot s'invite parfois dans les aquariums, véhiculé par les plantes.

Attention ! : Comme cette espèce a un large domaine de tolérance pour les facteurs physico-chimiques (salinité, température), elle tolère une légère pollution par les nitrates et l'envasement. Elle a un taux de reproduction élevé et donc de fortes populations et entre en concurrence avec les espèces présentes dans le milieu qu'elle colonise. L’extension de son aire de répartition est favorisée par la pollution par les nitrates des eaux non marines.
Elle profite également de nombreux moyens (vecteurs) pour sa dispersion : poissons, becs et pattes des oiseaux (ou par le transit digestif), barils d'eau potable des voiliers autrefois, ballasts des navires, engins de pêche (professionnels et de loisirs), bottes, transports de poissons d'eau douce ou encore de plantes aquatiques ornementales (Japon), etc...
On veillera donc à ne surtout pas l'introduire dans le milieu naturel, en prenant soin de détruire consciencieusement les plantes et autres rejets d'aquarium si l'escargot est présent.
Reproduction
Type
Ovovivipare
Difficulté
Courante
Paramètres
Température
15 à 25 °C
Les sexes sont séparés, mais dans son aire de répartition naturelle, cette espèce se reproduit à la fois par reproduction asexuée et sexuée, mais dans les zones où elle a été introduite, les individus sont généralement des femelles et se reproduisent par parthénogenèse.

Les populations en Europe et aux États-Unis d’Amérique sont uniquement parthénogénétiques. Elles sont composées de femelles et il n’y a pas de fécondation. Une femelle peut être à l’origine d’une colonie entière. Cependant certaines populations européennes peuvent compter entre 0 et 5 % de mâles (voire jusqu’à 20 %). Ces derniers ne semblent pas participer à la croissance de la population.
Les femelles sont ovovivipares c'est-à-dire que les embryons se développent complètement dans une poche de la cavité palléale avant d’être libérés, lorsqu’ils sont capables de ramper (coquille de 1,5 tour et 350-400 µm de long). Ces embryons blancs dans la poche incubatrice sont visibles à travers le dernier tour de la coquille.
Les femelles sont capables de se reproduire trois à neuf mois après leur naissance (pour une taille de coquille d’environ 3,5 mm), elles produisent environ trente à quarante voire cinquante jeunes à chaque fois et en moyenne deux-cent trente descendants par an. Le cycle de vie est annuel.

Cette espèce diploïde possède vingt-quatre chromosomes mais on observe dans les populations parthénogénétiques des individus triploïdes (36 chromosomes) voire tétraploïdes (48 chromosomes).

Note : Les larves de trématodes parasites dont Potamopyrgus antipodarum est l’hôte se développent au sein des gonades et ainsi bloquent la reproduction.
Commentaires
Etymologie : Potamopyrgus du grec [potam] "fleuve" et [pyrgus] "tour (de château)", faisant référence à l'habitat et à la forme de la coquille (Stimpson, en1865), et antipodarum "des antipodes".

En Europe, l'espèce était connue sous le nom d'espèce jenkinsi, Smith en 1889, Ce dernier l'avait dédiée à A.J. Jenkins, un tapissier (passionné de conchyologie) des environs de Londres (Woolwich) qui avait récolté les spécimens dans des mares le long de la Tamise.

Note : En Corse, à la fin des années soixante, il a été envisagé d’évincer le Bulin tronqué (Bulinus truncatus, (Audouin, 1827)) par la présence de Potamopyrgus antipodarum. En effet, cette dernière espèce entre en concurrence (certainement pour la nourriture) avec les espèces autochtones dans les biotopes où elle est introduite. Le Bulin tronqué est un vecteur de la bilharziose vésicale (maladie parasitaire due à un ver).
Certaines démangeaisons observées chez des nageurs en eaux douces européennes sont dues aux larves de vers trématodes (cercaires* de schisostomes). Ces vers trématodes pourraient être éradiqués grâce à l'utilisation de l'hydrobie des antipodes.
Références
GBIF, IUCN, CREEE
DORIS (https://doris.ffessm.fr/ref/specie/4832)
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- Fretter V., Graham A., 1962, British Prosobranch Mollusc - their fonctionnal anatomy and ecology, Ray society, London, GB.
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- Hayward P.J., Ryland J.S., 1991, The marine fauna of the British isles and north-west Europe vol. 2 - Molluscs to chordates , Oxford Science Publications.
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Pour citer cette fiche :"Potamopyrgus antipodarum, Gray, 1843" B-Aqua / TE, GP (2023)