C'est un des plus petits poissons de Borneo, mesurant au maximum 1,2 cm. Le genre Paedocypris « petites carpes », comprend les plus petites espèces de vertébrés d’eau douce au monde !

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Taxinomie
Descripteur : Kottelat, Britz, Tan & Witte, 2006
Classe: Teleostei
Ordre: Cypriniformes
Famille:  Paedocyprididae
Genre:  Paedocypris
Membres du genre Paedocypris
Paedocypris progenica (Kottelat, Britz, Tan & Witte, 2006)
Paedocypris micromegethes (Kottelat, Britz, Tan & Witte, 2006)
Origine géographique
Aire d'origine : Asie
Malaisie
Le Paedocypris micromegethes est connu dans les habitats à l'eau noire des forêts marécageuses tourbeuses de Sarawak, Malaisie Bornéo, où il est présent au nord de Sibu. Les populations d'une espèce de Paedocypris au sud de Sibu sont morphologiquement similaires à P. micromegethes mais l'analyse génétique en cours suggère qu'elles représentent une espèce différente non décrite.
Environnement
Paramètres
Milieu
Douce
P.micromegethes habite les tourbières et marécages aux « eaux noires » riches en tanins et matières organiques à décomposition très lente, très acides (pH 3-4), au courant lent des forêts tropicales de Bornéo. Exemple ci-contre de milieu typique, photo prise au Mulu National Park, Sarawak.
Ils en occupent les zones les plus fraiches, dans la partie inférieure de la colonne d’eau, près du fond (mais pas ce dernier). Son habitat est ombragé, dans les forêts primaires ou secondaires, il est absent des zones exposées à la lumière.

Le climat équatorial de Borneo est marqué par des pluies torrentielles fréquentes, quasi quotidiennes. En quelques heures, les ruisseaux se transforment en torrents, entraînant des brindilles et boues, prenant la couleur du café au lait. Quand le soleil revient, cela prend environ 4-5 heures pour que l’eau retrouve sa limpidité initiale. Ce cycle se répète environ tous les deux jours à toutes les semaines, selon la saison.
Critère : B1ab(i,ii,iii,iv)+2ab(i,ii,iii,iv)
Les habitats d'eaux noires où l'on trouve les espèces de Paedocypris sont déjà fortement dégradés, voire entièrement détruits, ce qui a entraîné la disparition locale de nombreuses sous-populations et le rétrécissement de l'habitat disponible.Les forêts marécageuses tourbeuses restantes sont extrêmement menacées par les activités anthropiques - qui constituent donc la principale menace pour l'espèce à l'échelle de l'aire de répartition - telles que la déforestation, la conversion en plantations (principalement des plantations de palmiers à huile) et en exploitations agricoles (principalement des élevages de crevettes), l'extraction d'eau et l'assèchement.
Description
Taille
: 0,97 à 1,2 cm SL  
: 0,73 à 1,1 cm SL
Respiration
Branchiale
Régime
Planctonivore
Comme les deux autres espèces actuellement connue (P.progenetica et P.carbunculus), les Paedocypris ont les caractéristiques uniques suivantes :
- Le rayon le plus externe de la nageoire pelvienne du mâle est fortement modifié avec une hémitriche ventrale fortement élargie, aplatie, soutenant le coussinet cutané kératinisé et l'extrémité de l'hémitriche dorsale supportant une petite projection en forme de crochet de peau kératinisée dirigée vers l’extérieur.
- muscles abducteurs et arrecteurs ventraux de la ceinture pelvienne du mâle hypertrophiés, les premiers étant attachés à l'extrémité ventrale de l'os suspensorium (versus non hypertrophiés et muscles abducteurs limités à la basiptérygie)
- coussinet de peau kératinisée devant la nageoire pelvienne chez le mâle, caractère juvénile conservé chez l'adulte.


Les caractères suivants sont uniques chez les Cypriniformes :
- présence chez les adultes (contre seulement chez les larves) d'un long pli post-anal de la nageoire larvaire le long du bord ventral du pédoncule caudal, depuis l'extrémité postérieure de la base de la nageoire anale jusqu'à la base de la nageoire caudale.; basiptérygion du mâle (Os pelvien sur lequel la nageoire pelvienne est attachée)est hypertrophié (versus non hypertrophié);
- vertèbres abdominales 7 à 13 avec de courtes épines hémales (par rapport aux épines hémales uniquement sur les vertèbres caudales) ;
- papille génitale du mâle hypertrophiée, en forme de petit sac entourant et comprenant 2 ou 3 rayons antérieurs de la nageoire anale, confluent postérieurement avec la membrane de la nageoire;
dents pharyngées tricuspides.
Les individus gardent des caractères larvaires, leur squelette n’est que partiellement ossifié et reste en partie cartilagineux, le crâne dépourvu des os frontaux et de nombreux os du neurocrâne ne protégeant que partiellement le cerveau. (Pseudomorphose progénetique).

Les caractéristiques qui distinguent P.microgenethes de P.progenetica (ce dernier : entre parenthèses) :
- Taille un peu plus grande (mâle max. : 11,6 mm contre 9,8 mm ; femelle : max. 11,4mm contre 10,3 mm).
- Coussin kératinisé devant les pelviennes du mâle plat ou légèrement renflé (contre en saillie),
- tubercules reproducteurs sur le dentaire disposés en rangée droite, sans former de groupe (au lieu de former un groupe de jusqu'à cinq tubercules individuels étroitement disposés, sous-distalement sur le côté latéral du dentaire, soutenus par une extension osseuse latérale bien visible),
- nageoires pelviennes de femelle vestigiale, ou souvent absente (contre plus petite que chez le mâle mais de forme similaire),
- présence d'un pli pré-anal chez la femelle (un caractère unique parmi les téléostéens ; versus absent chez les deux sexes),

Coloration : corps globalement transparent, denses petits chromatophores dans la couche profonde de l'abdomen apparaissant comme une tache continue, minuscules vermiculations noires sur le ventre de la gorge à l'anus, y compris sur le bouton kératinisé pré-pelvien du mâle (par rapport aux grands chromatophores superficiels et isolés sur le ventre de la gorge à l'anus, absents sur le coussinet kératinisé du mâle ), de nombreux petits chromatophores contigus sur la ligne médio-dorsale, organisés en 3 à 5 rangées, formant une large bande (contre quelques grands chromatophores isolés, formant 1 à 3 rangées irrégulières), rayons des nageoires pelviennes brun uni (contre des rangées de taches).
 
Régime Alimentaire
On a retrouvé dans l’estomac de ce tout petit poisson essentiellement des organismes planctoniques : cyclops et cladocères (puces d’eau), de 60 à 500 microns.

En aquarium, cela rend son alimentation complexe de par sa petite taille. Il faudra prévoir un bac mature et, en parallèle, un élevage de ce type de plancton, tout comme on élèverait des alevins.
Dimorphisme
le mâle se distingue par ses excroissances sur les longues pelviennes, les oeufs sont visibles par transparence chez la femelle.
Maintenance
Zone
Inférieure
Paramètres
Température
        25      0              28      0
pH
         3      0            5      0
GH
         1       0              5       0
Aquarium
Volume
60 l recommandé
Ces poissons, sérieusement menacés dans leur milieu, nécessitent un aquarium très particulier, à pH très bas, eau très douce riche en tanins. De plus leur disponibilité commerciale, à juste titre, est très rare.
Leur maintenance sera réservée à des aquariophiles avertis, soucieux de leur fournir cet habitat complexe, qui soit de surcroit capable d’assurer leur reproduction. A ce sujet, il faudra un aquarium mature, riche en tanins, feuilles mortes, au pH très bas, à l’eau très pure… et un bac d’élevage pour pouvoir disposer des aliments vivants requis pour les adultes et les éventuels alevins. Le low tech peut leur convenir à condition que l’eau soit parfaitement propre, avec plantes « en trempette » et flottantes pour limiter l’éclairage le plus possible, imitant ainsi les forêts sombres de Bornéo, où les arbres vivent les racines dans l’eau, laquelle est renouvelée fréquemment par les pluies quasi-quotidiennes.

Comme pour d’autres poissons vivant « dans des flaques » comme certains Bettas, on gardera à l’esprit qu’il s’agit d’une adaptation à une situation temporaire, de survie, leurs milieux naturels se mesurant plutôt en mètres cubes ! Vu sa petite taille, il faudra prévoir un minimum de volume pour le maintenir en groupe monospécifique.

Disponibilité commerciale : Très rare

On trouve très rarement des Pseudocypris, sur certains sites de grossistes, mais pas forcément correctement identifiés. Ils restent rarissimes à la vente.
Reproduction
Difficulté
Difficile
Dans leur milieu naturel, les Paedocypris se reproduisent avant d’avoir atteint leur taille adulte.
Le mâle est territorial, sa tache iridescente au sommet du crâne pourrait jouer un rôle attractif envers la femelle, par contraste sur le fond sombre du substrat lors des parades. Lorsqu’il a trouvé l’envers d’une feuille qui lui convient, il réalise une série de mouvements rythmiques pour attirer sa partenaire.

Au moment de la reproduction, la femelle se place sur le dos, sous une feuille, fermement agrippée par le mâle, qui utilise pour cela les petits boutons proéminents de ses nageoires paires. La forme allongée de ces dernières suggère qu’il puisse également manipuler les oeufs pour les positionner.
La femelle étudiée par Kottelat & al. portait 21 oeufs opaques, visibles par transparence, d’environ 0,40mm, ce qui est relativement gros pour sa taille. Les deux ovaires sont fonctionnels simultanément et il est probable que les oeufs soient pondus individuellement. Ils sont adhésifs et, après fécondation, restent collés à la face inférieure de la feuille choisie où ils se développent et éclosent au bout d’environ 30 heures, selon la température du milieu. Les alevins, après éclosion, restent quelque temps collés au substrat jusqu’à être capables de nager librement.
Leur alimentation reste problématique en captivité, les ressources doivent être microscopiques comme des infusoires afin de se développer correctement, ce qui reste un challenge pour les aquariophiles avertis et les chercheurs qui étudient ces poissons miniatures.
Commentaires
Son nom de genre vient du Grec Paideios (enfant) et Cypris : Vénus, nom qu’on donne aux carpes. Ce qui fait allusion au fait que les Paedocypris se reproduisent avant d’avoir atteint leur taille adulte.
Il y a actuellement 3 espèces reconnues : P.progenetica, P.micromegethes et la plus récente P.carbunculus.

Paedocypris désigne des « petites carpes », « micromegethes » désigne sa petite taille.
Cette « petite carpe minuscule » est endémique du nord-ouest de Bornéo - Sarawak. Leur corps semi-transparent aux taches sombres les aide à passer inaperçus, leur faible ossification squelettique leur permet de la souplesse pour manoeuvrer dans leur habitat encombré de feuilles et branches mortes, aux développements racinaires denses et aux espaces réduits.

Pendant longtemps, on a négligé les tourbières tropicales, pensant les conditions très acides du milieu trop agressives pour abriter une faune diversifiée. Les études récentes des scientifiques, dans les années 1990-2000, ont démontré le contraire. Par exemple on estime que 15% les espèces de poissons d’eau douce de la Malaisie sont dans ses tourbières.
La petite taille des espèces des tourbières leur permet de faire face aux assèchements temporaires, en survivant dans les mares et flaques à l’ombre, dans les trous d’autres animaux ou dans le sol, ce qui leur confère un très grand avantage adaptatif. Même dans les périodes les plus sèches, les tourbières retiennent toujours l’eau, et procurent de petites zones de refuge. Les espèces miniatures endémiques, comme Boraras, Sudadanio, Paedocypris, le groupe Kottelatlimia katik, Parosphromenus, le groupe des Betta coccina, sans compter les nombreuses espèces non encore découvertes sont parfaitement adaptées à ce mode de vie dans une zone aux paramètres très stables.

La grande rareté de ces milieux, qui plus est longtemps considérés comme non productifs les rend particulièrement vulnérables. Ils sont drainés pour l’agriculture, la tourbe prélevée comme combustible, bien que ce soit un stock de carbone en cours de fossilisation non négligeable.
Les réseaux complexes de tourbières et marécages du Sud-Est asiatique disparaissent à grande vitesse, par assèchement, déforestation…entre autres pour les cultures du palmier à huile et élevages de crevettes. Suite à ces destructions, le milieu a été particulièrement affecté par les immenses incendies de 1997 qui ont duré plusieurs mois. Kottelat & al. (voir article plus bas) rapporte que la plupart des tourbières qu’ils ont étudiées ont définitivement disparu et leur faune éradiquée avant même d’être découverte ou mieux étudiée, dont les Paedocypris.

Selon le Dr S.Page de l’Université de Leicester, à une telle vitesse d’éradication des tourbières de Bornéo, Sumatra et Papouasie Nouvelle Guinée, il est probable qu’elles aient disparu avant 2040, ainsi que les espèces qu’elles abritent, tout en libérant une quantité monstrueuse de CO2 et méthane dans l’atmosphère. Il est urgent et crucial que ces zones soient protégées.
Références
- GBIF : https://www.gbif.org/species/2367273
- Fishbase : https://fishbase.mnhn.fr/summary/Paedocypris-micromegethes
- Maurice Kottelat, Ralf Britz, Tan Heok Hui and Kai-Erik Witte in Proceedings B of the UK’s Royal Society 24 janvier 2006 : Paedocypris, a new genus of Southeast Asian cyprinid fish with a remarkable sexual dimorphism, comprises the world’s smallest vertebrate
- développement larvaire des P.carbunculus : https://www.researchgate.net/figure/Larvae-A-F-and-juvenile-G-stages-of-Paedocypris-carbunculus-BMNH-20186201-15_fig3_326066155