Si les substrats commerciaux possèdent parfois des propriétés particulières les rendant incontournables (ajustement de pH, baisse de la dureté,...), ces substrats sont souvent très chers et peuvent avoir des inconvénients (mauvaise tenu dans le temps, forte hausse des nitrates,...). Par ailleurs, leurs propriétés "techniques" ne sont pas nécessaires pour la grande majorité des aquariums. Je vous propose donc ci-dessous des substrats nutritifs "fait maison", dont les recettes conviennent à la grande majorité des plantes et des aquariums avec des résultats très convaincants, pour un coût vraiment dérisoire. Ces substrats conviennent aussi bien aux aquariums Low-Tech, Walstad et Standard, même s'ils sont plutôt inspirés par les substrats de type Walstad.
I - LA COUCHE SUPERIEUR
Epaisseur : 2 à 3 cm. Elle peut être plus épaisse si la granulométrie du matériau utilisé est supérieure à 1 ou 2 mm.
Cette couche doit respirer et fournir un milieu propice au développement bactérien. Les matériaux poreux présentent à cet égard, l'avatange de constituer un meilleur support. Ce n'est pas indispensable, mais préférable pour les aquariums non filtrés.
De nombreux matériaux conviennent pour la constituer, mais on sera attentif à avoir une granulométrie entre 1 et 5 mm. Un sable trop fin ne permettra pas la circulation de l'eau dans le substrat, une granulométrie trop forte entrainera des difficultés de plantation et l'accumulation de déchet (restes de nourriture inatteignables par les poissons par exemple). Un matériau poreux sera un plus pour les bactéries.
Quelques exemples :
- Le sable de Loire - C'est un matériau assez pauvre, même s'il peut apporter certain minéraux. Il n'est pas poreux.
- Akadama - Poreux, tamponne une faible conductivité et un pH acide.
- Manado - Poreux et neutre (sauf monté temporaire du GH)
- Quartz - Totalement neutre, non poreux, mais certaines marques peuvent être blessantes pour les poissons de fond.
- Litière pour chat sans additif (kaolinite pure)
Attention à bien rincer tous ces matériaux avant de les ajouter dans l'aquarium.
Petite remarque supplémentaire : Privilégiez des colories naturels pour le quartz. On trouve rarement du sable rose ou bleu au fond de nos rivière, et certaines personnes pensent que cela peut stresser les poissons. De plus, les colorants ne sont pas toujours stables et peuvent ajouter une pollution invisible de l'eau.
II - LA COUCHE NUTRITIVE
Epaisseur : 2 à 5 cm.
Les bases
L'objectif de cette couche est de créer des complexes argilo-humiques (CAH) indispensables aux plantes et au bon fonctionnement de l'aquarium en général.
Les CAH sont constitué de 3 éléments :
- Argile
- Humus
- Minéraux ioniques
L'humus et l'argile sont tous deux électronégatifs. Afin de les lier, la présence de cations (ions positifs) est donc nécessaire. Ce complexe va donc absorber (et donc retirer de l'eau) des cations présents dans l'eau: Ca2+, K+, H+, Fe2+, Fe3+, Mg2+... Ces échanges ioniques se font et se défont en permanence. Les CAH vont alors jouer un rôle tampon dans l'aquarium, absorbant les ions présents en forte quantité, et relâchant ceux qui viendraient à manquer. Autre propriété intéressante, les CAH vont chélater les éventuels métaux lourds de l'eau, permettant l'utilisation d'une eau de qualité médiocre (dans des limites raisonnables).
Remarque : les nitrites et les nitrates ne sont pas fixés par les CAH.
Les ingrédients
L'humus
L'humus peut être apporté par n'importe quel terreau, composte, terre de bruyère,... La terre de bruyère et certains terreaux ont l'avantage d'avoir un pH acide qui fera baisser un petit peu celui de l'aquarium. Cet effet restera toutefois limité et nécessite un KH faible.
Attention :
- Il est conseillé de tamiser le terreau afin de retirer les plus gros débris organiques (branches, feuilles, racine...) qui risqueraient de fermenter en générant des gaz toxiques à hautes doses (méthane ou dioxyde de carbone). A noter que le même principe permet un apport en CO2 constant et bénéfique dans l'aquarium. Tout est question de proportions. Ce type de sol permet de se passer, ou au moins de rendre moins indispensable, les injections de CO2.
- Ne pas utiliser du terreau enrichi en engrais. Il risquerait de relâcher des nitrates en quantité dans l'aquarium. Mieux vaut prendre un terreau "bio".
- Certains terreaux contiennent déjà des quantités non négligeables d'argile, il n'est alors pas nécessaire d'en ajouter.
L'argile
Les différents types d'argiles conviendront tous mais auront des propriétés légèrement différentes. Par exemple :
- Argile rouge, orange ou jaune : Contient du fer oxydé (Fe3+). La couleur est un indicateur de la concentration en fer, forte pour la rouge et faible pour la jaune.
- Argile verte (Illite), grise (Montmorillonite): Contient du fer oxydé (Fe2+)
- Argile blanche : Ne contient pas ou peu de fer
- Kaolinite pure : A tendance à tamponner le pH vers 6.5 (L'efficacité de cette propriété semble toutefois très limitée).
- Kaolinite + Calcite : Augmente la dureté de l'eau et le pH
Il n'y a pas de différences majeures entre l'argile rouge et l'argile verte pour l'aquariophilie. Les concentrations en fer sont assez proches. Par ailleurs, une fois l'oxyde de fer repassé dans l'eau, il se présentera majoritairement sous la forme Fe
2+ absorbable par les plantes quelle que soit sa forme d'origine.
Attention : Un substrat contenant de la calcite ou de l'aragonite sont à éviter. En effet, mis en présence d'acides humiques, la conductivité et donc le GH peuvent monter très fortement, dans des proportions non viables pour les animaux et les plantes. Le pH aura lui aussi tendance a monter très fortement. Dans le cas d'aquarium Low Tech ou Walstad, l'ammoniac sera alors prédominant sur l'ammonium.
Il est vivement conseillé d'acheter de l'argile en poudre pour se faciliter la vie. Vous la trouverez au rayon "cosmétique bio" ou sur certains sites de VPC d'aquariophilie.
Le sable
L'argile ayant tendance à se compacter et à être imperméables, l'ajout de sable permet un circulation convenable (et indispensable!) de l'eau dans le substrat. Le sable apporte par ailleurs quelques éléments nutritifs. Ce sable n'est pas obligatoirement du sable de Loire pour aquarium. Du sable de maçon convient très bien par exemple.
Les recettes
Il existe autant de recettes que d'aquariophiles, voici quelques exemples :
- Le substrat "Bison" : 40% de terre de bruyère + 40% de sable de Loire + 20% argile verte
- Le substrat "TheEdge" : 50% terreau pour bassin + 20% argile verte/grise + 30% sable. Les terreaux pour bassin contiennent souvent de l'argile, il n'est alors pas nécessaire d'en rajouter. Vérifiez sa composition au moment de l'achat.
- Le substrat du "jardinier" : De la terre de jardin, tout simplement!Il peut être nécessaire de la retravailler un peu, lui adjoindre soit du sable (si très argileuse), soit du composte (si très pauvre). L'ajout d'argile semble moins indispensable mais reste possible. Attention aux phytosanitaires utilisés dans le jardin. Il y a un risque modéré d'apparition de plantes ou bestioles inattendues, surtout si vous pratiquez démarrage à sec.
- Le substrat "pure" : Comme mentionné plus haut, de nombreux terreaux contiennent déjà des CAH, on peut donc utiliser ces terreaux seuls. Quant à l'utilisation de composte seul, cela me semble un peu "fort", je trouve préférable d'y adjoindre du sable et de l'argile (voir recette Bison).
Ce ne sont que des exemples, libre à vous de vous en inspirer pour créer votre propre recette en fonction des matériaux dont vous disposez.
Ces différents matériaux n'ont pas besoin d'être rincés (sauf le sable peut-être), je trouve donc plus simple de les mélanger puis les ajouter dans l'aquarium à sec.
III - LA COUCHE INFERIEUR
Elle n'est pas obligatoire et ne servira qu'à créer du relief (les autres couches devant faire une épaisseur relativement constante). Son épaisseur n'a donc pas de limite, si ce n'est l'équilibre de la masse de substrat.
Elle doit être constitué de matériaux inertes et non calcaires. On peut utiliser du gravier plus ou moins fin, de la pouzzolane, voir des boites en plastique lestées.
IV - SEPARER LES COUCHES
Il est possible de séparer les couches. Ce n'est obligatoire, mais peut s'avérer pratique.
Entre la couche supérieure et la couche nutritive : Une moustiquaire ou grille fine. Elle doit laisser passer les racines, mais retenir la terre le jour où on arrache une plante. Par ailleurs, elle nous évite de planter les plantes directement dans la couche nutritive, ce qui peut parfois conduire à la "brulure" du système racinaire.
Entre la couche inférieure et la couche nutritive : Un voile géotextile. Il permet d'éviter que la terre vienne se mélanger à la couche inférieure et donc d'avoir un affaissement du substrat.
Article écrit par TheEdge
Article initialement publié par le même auteur sur www.aquachange.fr